Disparaître totalement d’Internet est une tâche complexe, presque impossible, tant nos données sont disséminées sur de multiples plateformes. Cependant, en France, le droit à l’effacement, souvent appelé « droit à l’oubli », permet d’exercer un certain contrôle sur ses informations personnelles en ligne.
Cet article explore les mécanismes de ce droit, ses limites et les démarches à entreprendre pour reprendre le contrôle de sa présence numérique.
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Comprendre le droit à l’effacement
Le droit à l’oubli et ses grands principes
Le droit à l’effacement est inscrit dans le « Règlement Général sur la Protection des Données » de l’Union européenne, plus connu sous son acronyme de « RGPD ».
En vertu de l’article 17 du RGPD, une personne peut en effet demander la suppression de ses données personnelles dans plusieurs situations, en particulier si :
- les données ne sont plus nécessaires au regard des finalités pour lesquelles elles ont été collectées ;
- le consentement sur lequel se base le traitement est retiré ;
- les données ont été traitées de manière illicite ;
- les données doivent être effacées pour respecter une obligation légale.
Ce droit vise à protéger la vie privée en permettant à chacun de contrôler la diffusion de ses informations personnelles.
Les limites du droit à l’oubli
Bien que très large et hautement protégé, ce droit connaît des exceptions.
Par exemple, le droit à l’oubli ne peut pas être exercé si le traitement des données est nécessaire :
- à l’exercice du droit à la liberté d’expression et d’information ;
- au respect d’une obligation légale imposant la conservation des données ;
- à des fins d’archives dans l’intérêt public, de recherche scientifique ou historique, ou à des fins statistiques ;
- à la constatation, l’exercice ou la défense de droits en justice.
Ainsi, une demande d’effacement peut être refusée si elle entre en conflit avec ces obligations ou droits. Ces cas sont cependant très minoritaires et ne peuvent pas, pour la plupart, être invoqués par des entreprises de services.
À noter que certaines informations peuvent tout de même être conservées par les entreprises si elles justifient d’un « intérêt légitime ». De manière générale, si vous avez un contrat en cours et que les informations sont essentielles à la délivrance du bien ou service.
Imaginons que vous commandiez un parfum en ligne : très logiquement, l’entreprise serait tenue de conserver votre adresse de livraison, a minima le temps nécessaire à l’expédition du produit. Dans ce type de situation, vous pouvez donc bénéficier d’un effacement partiel de vos données uniquement.
Comment exercer son droit à l’effacement ?
De manière générale et pour demander la suppression de vos données personnelles en ligne, suivez ces étapes :
- identifier le responsable du traitement : repérez l’organisme ou la personne qui détient vos données. Leurs coordonnées se trouvent généralement dans les mentions légales ou la politique de confidentialité du site concerné ;
- formuler une demande explicite : adressez une demande claire en précisant les données que vous souhaitez voir effacées et les raisons motivant votre requête – bon à savoir : vous pouvez parfaitement demander l’effacement d’une partie seulement de vos informations personnelles et conserver le reste ;
- conserver une trace de vos démarches : gardez une copie de votre demande et des éventuelles réponses reçues.
Le responsable du traitement dispose d’un délai d’un mois pour répondre. En cas de refus ou d’absence de réponse, vous pouvez saisir la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL).
Si vous n’êtes pas sûr de ce que vous devez supprimer ou non, vous pouvez exiger une copie de toutes les informations personnelles vous concernant, auprès du responsable de traitement, et formuler la demande d’effacement de façon plus précise ensuite.
Bien évidemment, en cas de refus ou d’absence de réponse de la part du responsable de traitement, vous avez des voies de recours. Vous pouvez solliciter le Médiateur des communications électroniques via le site dédié ou, dans le pire des cas, saisir la Justice.
Au-delà du droit à l’oubli, quelles solutions ?
L’alternative du déréférencement
Si des informations vous concernant apparaissent dans les résultats des moteurs de recherche, vous pouvez demander leur déréférencement. Cela signifie que les liens vers ces informations ne seront plus affichés lors d’une recherche à partir de votre nom. Les pages existent toujours, mais sont nettement moins accessibles. Pour ce faire, contactez directement les moteurs de recherche, comme Google ou Bing, via leurs formulaires dédiés.
Conseils pour limiter votre empreinte numérique
Outre l’exercice du droit à l’effacement, adoptez des pratiques pour réduire votre présence en ligne :
- gérez vos paramètres de confidentialité : ajustez les réglages de vos comptes pour limiter la visibilité de vos publications et de vos informations personnelles ;
- nettoyez vos publications : effacez les anciens messages, photos ou commentaires susceptibles de nuire à votre réputation ;
- supprimez les comptes inactifs : fermez les comptes que vous n’utilisez plus sur les réseaux sociaux, forums ou sites marchands ;
- utilisez des services de suppression de données : des entreprises proposent de vous aider à effacer vos informations des bases de données en ligne. Par exemple, des services comme DeleteMe ou HelloPrivacy peuvent vous assister dans cette démarche.
Les défis de la suppression totale
Malgré vos droits et ces outils, éliminer complètement ses traces en ligne reste ardu. Les données peuvent être dupliquées, archivées ou hébergées sur des sites étrangers échappant aux législations européenne et française. De plus, certaines informations, une fois partagées, peuvent être reprises et téléversées par d’autres utilisateurs ou plateformes, rendant leur suppression difficile.
Le droit à l’effacement offre aux citoyens français un moyen de reprendre le contrôle sur leurs données personnelles en ligne. Malgré ses limites, ce droit fondamental permet de retrouver un début d’anonymat et de naviguer plus sereinement en ligne.
Notez que le seul exercice du droit à l’oubli est insuffisant : il doit être complété par une démarche proactive de gestion de sa présence numérique. La vigilance et la prudence demeurent les meilleures protections contre une exposition indésirable sur Internet.
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Si vous utilisez régulièrement Internet, nous vous recommandons en outre d’utiliser un VPN, pour anonymiser vos données et renseigner le minimum d’informations personnelles. Car, comme nous l’avons vu, une fois que quelque chose est mis en ligne, en reprendre le contrôle devient un défi herculéen !