Après la graphologie, voici venue l’ère de la « frappologie » ! Ce mot désigne tout simplement l’étude de la manière dont chacun frappe sur son clavier. Car vous l’ignoriez peut-être, mais la manière de frapper sur un clavier est propre à chacun : il y a ceux qui hésitent, ceux qui cherchent leurs touches, ceux qui tapent comme sur un tambour, ceux qui frappent plus vite que leur ombre, ceux qui n’utilisent jamais certaines touches…
Comment ça marche?
La frappologie étudie la façon de manier son clavier, sa souris ou l’écran tactile de son téléphone ou sa tablette. La vitesse et la pression exercées sur les touches sont effectivement propres à chacun (le temps d’appui, le temps que vous mettez pour passer d’une touche à une autre…). Du coup, une équipe de chercheurs français s’est penché sur le sujet et a développé un logiciel pour analyser nos frappes. « À quoi ça sert ? » me direz-vous…
Des chercheurs de l’École nationale supérieure d’ingénieurs de Caen ont mis au point un logiciel capable de reconnaître cette dynamique de frappe et l’outil permet de déterminer plusieurs critères sur vous : dans 9 cas sur 10, selon les chercheurs, on peut savoir si vous êtes un homme ou une femme, votre tranche d’âge, ou si vous êtes droitier ou gaucher. Mais ce n’est pas tout ! On pourrait également identifier certaines émotions comme le stress, et, dans les prochaines années, on pourrait déterminer avec précision votre profil psychologique.
Pour la petite histoire…
Cette technique de biométrie comportementale a été étudiée aux États-Unis dès les années 1980. À l’origine, c’est la Darpa (l’agence de recherche du ministère de la défense) qui souhaitait trouver un moyen sécurisé de se passer des mots de passe, finalement peu sécurisés.
Mais il faut noter que dès la seconde guerre mondiale, il était possible d’identifier quel opérateur était en train de communiquer en morse juste en analysant sa façon de faire (vitesse du message, redondance des mots…).
Les usages possibles de la frappologie
On voit de nombreuses applications à cette technique : si des militaires l’utilisent déjà dans des sous-marins pour contrôler l’accès à certaines commandes, on peut imaginer par exemple des usages visant à sécuriser des sites sensibles. Si la frappologie ne vient pas remplacer le mot de passe, elle pourrait cependant venir en complément pour réduire les risques d’usurpation d’identité par exemple.
Cela pourrait servir aussi notamment à limiter l’accès à des sites de paris en ligne ou pornographiques en déterminant simplement l’âge de l’utilisateur. En France, plusieurs banques s’y intéressent, tout comme des sites e-commerce qui pourraient détecter par exemple les faux aux sur internet en repérant la fréquence des copier-coller, ou choisir d’afficher des contenus différents selon que vous êtes un homme ou une femme…
En entreprise, le contrôle par biométrie comportementale pourrait venir remplacer (ou compléter, en attendant que la technologie soit suffisamment au point), les traditionnels codes d’accès, peu sécurisés (notés sur des Post-it, communs à tout un service, identiques au login…).
Et bientôt, des recruteurs pourraient s’en servir pour remplacer l’étude graphologique.
Adieu l’anonymat ?
Mais cela signifie aussi qu’il est pratiquement impossible de rester anonyme sur internet…
Même si vous souhaitez cacher votre identité, vous serez trahi lorsque vous naviguerez sur les sites dotés de cette technologie. Si certains y voient un fichage, la Cnil doit pourtant valider tous les projets utilisant la frappologie. C’est même en juin 2011 que la Cnil a autorisé la frappologie comme système de biométrie comportementale. On peut donc s’attendre à son développement rapide dans les années à venir, en raison notamment de coût modeste, sa simplicité et son acceptation par les utilisateurs, qui la jugent « assez respectueuse de la vie privée ».
Enfin, pour vous protéger il existe un logiciel qui permet de masquer votre rythme de frappe sur le clavier.