Avec 955 millions d’utilisateurs, il est difficile de faire le tri entre toutes les informations que l’on peut voir circuler sur Facebook et de juger de leur véracité de façon absolument certaine.

Il y a déjà un an maintenant, je vous mettais en garde contre une rumeur qui revient régulièrement à propos de Facebook.

Il y a quelques jours, un nouveau bruit a couru en prenant des proportions assez phénoménales. Si vous êtes inscrit sur Facebook, vous n’avez pas pu passer à côté de ce message :

« MESSAGE IMPORTANT !!!! Facebook a fait une MAJ gênante ! Ils ont mis tous vos messages persos, initialement en Inbox, d’avant 2009 dans votre Timeline. Ils sont désormais mélangés aux vrais posts sur vos walls !!!

Si vous voulez conserver votre vie privée et éviter de potentiels gros scandales dans vos relations personnelles, veuillez checker votre Timeline au niveau de chaque année avant 2009, appuyer sur le crayon et cacher les posts de la Timeline.

Cacher vos messages ne concerne pas seulement votre vie personnelle mais aussi celle de vos contacts !! Donc par respect pour la vie privée des autres, svp faîtes-le ! ».

Pendant une semaine tout le web francophone s’est affolé en relayant « l’information » et en criant au scandale. Je vous rassure tout de suite, il s’agit bel et bien d’une rumeur totalement infondée. Vos conversations privées n’ont jamais été publiées sur votre Mur à la vue de tous.

 

D’où vient cette psychose générale ?

Régulièrement, Facebook est le sujet de nombreux hoax et autres rumeurs ou canulars. Cette fois, la fausse information a été relayée en premier lieu par le quotidien Metro, qui voulait alerter ses lecteurs sur le phénomène. Mais l’information, qui n’avait pas été vérifiée, a été reprise par toute la presse en quelques heures et le message qui circulait sur Facebook a été relayé encore plus vite. Avec plus de 24 millions d’utilisateurs en France, la paranoïa s’est vite généralisée, chacun y allant de son témoignage affirmant être concerné par le bug.

Mais aucune preuve n’a été fournie. Il aurait fallu pour cela que des utilisateurs puissent croiser les publications avec des e-mails de notification de message privé, par exemple. Qui se souvient de ce qu’il a envoyé de façon publique ou privée il y a 4 ans ? En sachant que l’utilisation que l’on faisait de Facebook à l’époque était bien différente de maintenant.

Toutefois, de nombreux internautes alertés ont saisis la CNIL, qui a alors décidé d’enquêter. De son côté, Fleur Pellerin, ministre de l’Economie Numérique, Conseillait aux utilisateurs concernés de porter plainte si la culpabilité de Facebook était avérée.

Ce qu’il est important de souligner maintenant que l’on sait que l’information était fausse, c’est la vitesse à laquelle cette rumeur infondée s’est propagée, avec l’aide de la presse. Qu’ils soient spécialisés ou généralistes, les titres de presse influents ayant relayé ces faits sans les vérifier sont incroyablement nombreux. La psychose qui s’est emparée des internautes a largement été alimentée par ces articles à la limite de la diffamation.

Certaines personnalités politique ont demandé à Facebook de prouver son innocence (notons que généralement, il faut plutôt prouver la culpabilité d’un accusé, non son innocence).

 

Les conclusions de la CNIL sur le « bug » Facebook

Ce mardi 2 octobre, la CNIL a rendu son rapport d’enquête et a conclu que : 

« les messages incriminés par de nombreux utilisateurs Facebook semblent être exclusivement des messages « wall-to-wall » (de « murs à murs ») et non des messages envoyés par l’intermédiaire de la « messagerie privée » de Facebook. Pour autant, le caractère privé du contenu de certaines des communications révélées semble indiscutable. En d’autres termes, les utilisateurs avaient l’impression d’envoyer des messages privés lorsqu’ils utilisaient la messagerie wall to wall.

Plusieurs raisons expliquent ce phénomène :

• Le fonctionnement de Facebook avant 2010 n’était pas comparable au fonctionnement du site de réseau social aujourd’hui. L’ergonomie du site était telle que la visibilité des messages « wall-to-wall » était beaucoup plus réduite. […]
• Facebook a modifié de manière unilatérale et récurrente les paramètres de confidentialité des données entre 2009 et 2010. […] En effet, par défaut, si les utilisateurs n’étaient pas vigilants ou s’ils suivaient les recommandations de Facebook, des contenus auparavant privés ou accessibles uniquement aux amis étaient rendus accessibles à tout le monde. Par ailleurs, les messages concernés pouvant être anciens, il devenait parfois difficile pour les utilisateurs de constater ce changement d’audience des messages. […] »

Ainsi, lors du passage au format Timeline, des messages publics autrefois tombés aux oubliettes au fil des publications, sont redevenus accessibles en parcourant le journal. La CNIL « encourage donc à Facebook à garantir :

• Une plus grande transparence vis-à-vis de leurs utilisateurs quant à l’usage de leurs données personnelles,
• La mise à disposition d’outils offrant aux utilisateurs un meilleur contrôle de leurs données et des informations qu’ils publient,
• Le recueil du consentement exprès des utilisateurs pour la transmission de leurs données à des tiers ou l’activation de nouvelles fonctionnalités,
• Des paramètres par défaut protecteurs de la vie privée […]. »

 

Responsable mais pas coupable

Pensant probablement à une énième rumeur sans importance, Facebook n’a pas réagi tout de suite. Puis le réseau social a pris la parole pour expliquer dans un premier temps que les bases de données des messages privés et des messages publiés sur les Timeline ou les murs des utilisateurs étaient séparées et administrées par deux langages différents. Techniquement, il est donc peu probable que les deux types de messages se retrouvent  mélangés sur la même page.

Quelques jours après, Facebook France prend la parole sur sa page officielle pour mettre les points sur les « i » :

 

Il n’empêche que si Facebook n’est pas coupable, il n’en est pas moins responsable. C’est pourquoi des mesures ont d’ores et déjà été prises par le réseau et ce n’est pas fini.

Ces mesure débutent avec une nouvelle page d’aide, plus claire, qu’il est indispensable de consulter de temps en temps ! Véritable mode d’emploi, l’aide de Facebook répond à toutes les questions possibles et imaginables que l’on peut se poser.

Par ailleurs, Facebook rappelle la marche à suivre pour masquer les messages publiés sur le mur (que ce soit avant ou après la sortie de la Timeline) :

 

 

Les efforts de clartés de Facebook au niveau de ses paramètres de confidentialité sont bienvenus. Il est vrai que cet événement traduit une certaine confusion dans l’utilisation du réseau de la part de ses membres. Utilisation des données trop floues, paramètres de confidentialité modifiés, nouvelle utilisation du profil… A chaque changement opéré par Facebook, l’utilisateur ne se rend pas toujours compte que certains de ses réglages ont pu être modifiés, que des options ont pu apparaître ou disparaître… Bref, pour ne pas avoir peur dès que Facebook annonce une nouveauté, il vaut mieux prendre ses dispositions et se renseigner. Mais encore faut-il trouver lesdits renseignements facilement.

C’est pourquoi, si Facebook n’est effectivement pas coupable dans cette affaire, il peut être tout de même tenu pour responsable de ne pas avoir fourni plus tôt des conditions d’utilisation plus simples et claires.

Ainsi, Arnaud Montebourg et Fleur Pellerin ont demandé à Facebook de leur faire parvenir avant fin novembre les mesures que la société compte prendre pour respecter les recommandations de la CNIL en matière de protection des données personnelles.

 

Les autres « mythes » à propos de Facebook

 Dans une FAQ, Facebook classe l’affaire parmi les « mythes » qui l’entourent.

 

 

Ainsi, nous avons enfin des réponses claires et précises sur des sujets qui circulent régulièrement sur le réseau social :

• Non, Facebook ne deviendra pas payant pour ses utilisateurs,
• Non, les annonceurs n’ont pas accès aux informations personnelles des utilisateurs,
• Non, Facebook ne vend pas vos informations personnelles à des organismes tiers si vous ne le souhaitez pas,
• Non, il n’est pas possible de savoir qui a consulté votre profil. Aucune application tierce ne fournit ce service et si vous en trouvez une qui prétend pouvoir le faire, il est conseillé de la signaler à Facebook, 
• Non, les utilisateurs de Facebook ne peuvent pas savoir que vous avez consulté leur profil et encore moins combien de fois,
• Non, vos messages privés n’apparaissent pas sur votre journal, mais uniquement dans votre boîte de réception,
• Aucune information personnelle n’est communiquée aux sites extérieurs contenant des modules sociaux,
• Aucune application ne doit vous demander de vous connecter à nouveau, de répondre à un questionnaire, de saisir un code promotionnel, de télécharger quoi que ce soit, ou autre opération. Tout ce qu’il est possible de vous demander de faire est de cliquer sur « J’aime ».

 

 

Les dernières initiatives de Facebook en matière de clarté de ses conditions d’utilisation laissent penser que l’entreprise a pris conscience du manque de transparence perçu par ses utilisateurs et souhaite y remédier. Cependant, il est important que chaque membre du réseau social s’intéresse à ces conditions d’utilisation et à ses propres paramètres de compte et de confidentialité. Cela permettrait à chacun de rester serein quant à la visibilité de ses informations et d’être plus averti lors de la diffusion de fausses informations.